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En réaction aux attaques terroristes du mois d’octobre, le maire de Bègles, Clément Rossignol Puech, souhaite réaffirmer les convictions citoyennes et les valeurs qui forgent l’identité de notre territoire. Entretien.
Les récents attentats ont ébranlé le pays et replacent dans le débat public certains principes républicains, dont la laïcité. Comment avez-vous réagi à cette actualité dramatique ?
Je suis d’abord dans la compassion pour les victimes et leurs proches. Je suis aussi sous le choc de la barbarie des actes et c’est malheureusement le but recherché par les terroristes : enclencher une terreur collective. Et pourtant, il ne faut pas céder à la peur. Au contraire, il est nécessaire de réaffirmer nos valeurs et notre cohésion collective. Quand une démocratie est attaquée dans son cœur, en l’occurrence par l’assassinat d’un enseignant qui transmettait l’esprit critique et le libre arbitre, la capacité de penser par soi-même, ce sont les libertés fondamentales qui sont attaquées et il nous faut réagir par plus de démocratie. Prenons conscience que la démocratie est fragile. Elle peut vite se trouver sous les coups de butoir des populismes, des crises économiques et sociales, environnementales et des attaques terroristes. Notre démocratie peut facilement se déconstruire. Ceux qui font des appels à l’Etat martial sont irresponsables.
Ces tensions que nous traversons peuvent-elles conduire à des crises politiques, sociales ou environnementales ? Et comment résister ?
Je suis intimement persuadé qu’une crise environnementale peut mettre en tension les démocraties. Pourquoi ? Si le climat change, on verra apparaître de nouvelles maladies, les libertés publiques peuvent être affaiblies ou même réduites par l’Etat. On pourra connaître des tensions sur l’alimentation et les produits de base, on verra un creusement des inégalités sociales. Et une société inégalitaire fragilise la démocratie.
Mais il existe des solutions. Après les attaques terroristes, j’ai assisté à une messe œcuménique à l’église de Bègles aux côtés des imams de Bordeaux et de Cenon. C’était un geste fort et très émouvant. Notre ville a accueilli des communautés européennes au 20e siècle -espagnoles, portugaises, italiennes-, alors qu’elles pouvaient être mal perçues ailleurs. Bègles est de tout temps un refuge. Comme au 17e siècle, avec le temple protestant sur la place du Prêche qui accueillait les réformés à une époque où la liberté de culte pour les protestants n’était autorisée qu’en dehors des murs de Bordeaux. Les réfugiés, chassés de leur pays par la guerre ou la famine ont trouvé et trouvent encore à Bègles une terre hospitalière, marquée par un engagement renouvelé de ses citoyens. Cette ville populaire, ouvrière et maraîchère a su grâce à son terreau associatif important, ses écoles laïques, son Amicale Laïque, Secours Populaire, Restos du cœur, ses nombreuses associations sportives et culturelles, intégrer, soutenir et s’enrichir aussi de ses différences. N’oublions pas la célébration du mariage de deux personnes du même sexe en 2004 et le soutien en 1985 à Nelson Mandela au plus fort de l’Apartheid en le nommant citoyen d’honneur de la Ville alors qu’il était emprisonné en raison de sa lutte pour l’égalité raciale.
En effet, Bègles est de tous temps une terre multiculturelle. En quoi la laïcité et l’entraide fondent-elles les valeurs de la ville ?
L’esprit village, l’entraide entre voisins, nous permettent de continuer à cultiver au quotidien de nouvelles formes de solidarités. C’est aussi ça la transition écologique et sociale.
Le portage de repas pour les plus fragiles, faire ses courses pour son voisin, retaper ensemble un vélo, transmettre un savoir-faire, discuter entre deux parcelles de jardins partagés… la Fête de la Morue rassemble toutes ces énergies : on fait la fête ensemble, on partage un repas, on se retrouve entre amis, voisins, famille. Notre identité béglaise prend sa source dans ces échanges du quotidien, ces liens qui nous unissent.
Mais une identité, cela évolue et c’est normal. C’est la vie qui nous pousse à évoluer, à changer. C’est un mouvement naturel. La société évolue et il ne faut pas en avoir peur. Nous pouvons inclure les personnes qui arrivent en France et nous enrichir mutuellement. L’ouverture à l’autre, le changement ne sont pas des menaces mais au contraire une chance. Le rôle des élus est aussi de défendre les libertés publiques. C’est pourquoi, en tant qu’élus et citoyens, nous nous devons de réaffirmer nos valeurs que sont la fraternité, l’égalité entre tous, la liberté de conscience et la laïcité à la française où toutes les religions ont leur place. Pour cela, je propose qu’un arbre soit planté en hommage à Samuel Paty et aux valeurs attaquées par son assassinat. Le 16 octobre 2021, nous planterons un ginkgo biloba au Parc de Mussonville : plus ancienne famille d’arbre connue, le ginkgo est un symbole de résilience.